Endurance de force : pour que la force soit utile

Celles et ceux qui connaissent StrongFirst, savent que nous avons un Code. Le troisième article de notre code, « La force a une plus grande raison d’être », permet beaucoup d’interprétations. Mais dans tous les cas, cela suppose que cette force que nous cherchons à développer puisse être appliquée et utilisée. Or, peu de problèmes de la vie ressemblent à un nœud gordien : un seul bon coup d’épée ne suffit pas pour les résoudre. Il faut appliquer cette force encore et encore pour dominer l’adversité. Pour construire ce que l’on souhaite malgré toutes les résistances. La force pure est le premier pas pour celui ou celle qui s’engage sur la voie StrongFirst. Mais c’est l’endurance de force qui constitue l’objectif long terme qui donne le vrai sens à notre démarche.

Dans le premier chapitre de son livre « Rock, Iron, Steel – Le Livre de la Force », Steve Justa, un des auteurs cités par Pavel dans « Simple & Sinistre », partage avec nous sa vision de l’entraînement de l’endurance de force. En voici quelques extraits.

La force de l’esprit

Développer et endurcir la force de l’esprit et de volonté. Conquérir ses peurs. Aller là où on n’a jamais été auparavant, physiquement ou mentalement. Développer la confiance en soi lors d’une séance où vous avez envie de repousser vos limites. Accomplir on gros volume de travail. Se fixer un objectif impressionnant et l’atteindre en une journée. Ce n’est qu’un petit résumé des choses qu’une séance spéciale, axée sur l’endurance de force pourrait vous donner.

Vous êtes-vous déjà demandé ce que pourraient ressentir les bâtisseurs des pyramides d’Égypte ? Imaginez-vous la force et l’endurance que ces hommes devaient avoir ? Vous êtes-vous déjà demandé si vous en seriez capable ? Découper toute la journée des énormes blocs de pierre avec des outils rudimentaires… Puis, les tailler avec un burin et un marteau… Ensuite, les traîner sur des kilomètres à la main, avec des cordes…

Endurance de force - bâtir une pyramide

Suis-je assez fort ?

Je pense que tous, nous voulons connaître la réponse. …Ce genre de séances spéciales nous permet de voir ce que nous avons « dans le ventre », la force de notre corps et de notre mental, notre volonté. Les gens ont peur de beaucoup de choses. Mais toutes ces peurs proviennent du doute. Ils doutent de leur capacité de conquérir leur propre esprit.

Comme disait Franklin D. Roosevelt, « La seule chose dont nous devons avoir peur est la peur elle-même ».  La peur n’est pas réelle. Votre esprit la crée parce que vous le laissez faire. Mais si vous ne pouvez pas la contrôler, c’est elle qui vous contrôlera.

Entraînement de l’endurance de force

Là où je veux en venir, c’est l’entraînement de l’endurance de force. Ce type d’entraînement ne fait pas qu’endurcir le corps, mais aussi l’esprit. Ou plutôt, la volonté, puisque c’est la volonté qui gouverne l’esprit. Et plus vous renforcerez votre volonté, plus facile sera votre entraînement général.

La séance spéciale consacrée à l’endurance de force est un outil extrêmement puissant. Une seule de ces séances de 3 à 5 heures peut vous marquer à vie. Elle aura sur vous un impact incroyable. Elle laissera une empreinte si profonde que vous ne pourrez jamais l’oublier. Parce que quand vous vous battez pour survivre, quand vous usez de toute votre volonté pour lutter contre votre esprit, quand vous expulsez le poison de vos pores, pompez le sang et la peur et le doute à travers vos veines, sous tous ces efforts condensés en une période de cinq heures, vous n’allez jamais l’oublier. Je recommande à tous les pratiquants de faire ce genre d’entraînement au moins une fois dans leur vie.

C’est l’histoire d’un mec…

Parlons donc un peu de cette endurance de force. Je vais commencer par une histoire que j’ai vécue il y a plusieurs années. À l’époque, je m’entraînais avec des poids depuis 10 ans. J’avais de bons résultats dans plusieurs exercices et je me croyais plutôt fort, mais…

Je travaillais dans une usine où on fabriquait des grosses pièces en acier. Un jour, le patron m’a appelé pour me mettre sur un poste différent, puisque le mec qui l’occupait d’habitude a pris une journée. Ce mec était un petit gars. Il devait peser aux alentours de 60 kg, alors que moi, à l’époque, je devais faire 105.

Je savais ce qu’il faisait puisque je passais devant son poste pour aller à mon atelier d’usinage. Je l’ai vu travailler, mais je n’y ai jamais prêté attention. Jusqu’au jour où j’ai dû faire 12 heures à sa place. Après, pendant un bon bout de temps, c’était la seule chose à laquelle je pensais. Et encore aujourd’hui, ça me revient assez régulièrement. Voici ce qu’était ce boulot.

Les pièces en acier, encore chaudes, arrivaient de la fonderie sur un tapis roulant toutes les trois minutes. Mon boulot consistait à faire décoller la couche de sable qui restait encore dessus. Le sable ne voulait pas trop partir, alors je devais taper dessus, soulever et secouer la pièce jusqu’à 10-15 fois. Le poids des pièces variait de 60 à 100 et parfois, 120 kg. Taper, soulever, secouer, faire tomber, retourner, recommencer…

Si je prenais trop de temps, une autre pièce arrivait sur le tapis, puis une autre. Bientôt, toute une file de pièces à traiter s’alignait sur mon poste. Bonjour pour rattraper la cadence… En plus, j’étais constamment recroquevillé sur ces pièces, alors qu’elles irradiaient la chaleur.

Une leçon d’humilité

Inutile de dire qu’après deux heures à ce poste, j’étais au bout de ma vie, physiquement et mentalement. Mais surtout, j’avais devant les yeux l’image de ce gars dont c’était le travail quotidien. Sec comme un rail, il ne transpirait même pas. Avec lui, ce travail avait l’air facile. Et me voici, démoli, alors que je pensais que j’étais deux fois plus fort que lui.

Quatre heures plus tard, ma vision des choses a subi une métamorphose. Ce mec devait avoir 15 ou 20 fois plus d’endurance de force que moi pour être capable de faire ce travail jour après jour, semaine après semaine. …

Puis, j’ai demandé à moi-même : « À quoi bon être fort, si je ne peux pas utiliser cette force encore et encore ? » C’est là que l’endurance de force prend tout son sens. À ce moment précis, j’ai pris la décision de me rendre plus fort mentalement aussi bien que physiquement. En fait, j’avais honte. Il n’y avait personne autour de moi, mais la honte m’a frappé comme un camion de 10 tonnes. J’ai fait ce que j’ai pu pour finir la journée, puis trainé jusqu’à chez moi et dormi comme un mort. J’ai gardé les courbatures pendant une semaine.

Endurance de force - travail manuel

Après cette journée, j’ai décidé que de temps en temps, j’allais faire une séance spéciale pour l’endurance de force. Quelque chose de fou, une fois par mois ou comme je le sens. Ce petit gars m’a appris une leçon. Il y a plus à « être fort » que le poids qu’on peut soulever pour quelques répétitions, ou 1RM, ou une séance de 5 séries de 5 ou de 10.

Le concept

À mon avis, pour mériter de s’appeler « fort », vous devez être capable de faire 40, 50, voire 100 séries d’un mouvement avec un poids modérément lourd. Pas au point de mourir, mais juste être capable, si besoin, de faire ce mouvement encore et encore, pendant trois à cinq heures d’affilé. En faisant, bien sûr, des pauses appropriées entre les séries, mais sans excès.

Ce genre d’entraînement occasionnel est critique pour devenir vraiment fort. Je conseillerais de le faire une fois tous les deux mois… Chacune de ces séances s’imprimera sur votre mental à vie. Et même physiquement, vous vous en souviendrez, puisque quand vous le faites une fois, vous savez que vous pouvez le faire. Même si vous ne vous entraînez pas pour. Cela vous donnera une fortitude que restera avec vous pour le reste de votre vie.

Un exemple pratique

Un jour, lors d’un séminaire, j’ai vu un mec balèze faire 8 répétitions de Développé couché avec 220 kg. Une demi-heure plus tard, il avait encore le souffle coupé. C’est sûr, il était très fort, mais son endurance était si faible que 30 minutes ne lui suffisaient pas pour retrouver une respiration normale. Alors, quelle utilité cette force a-t-elle dans la vie réelle, sans aucune endurance derrière ?

Pour moi, ce mec-là était faible, alors même qu’il pouvait pousser plus que moi en Développé couché. Tout comme je l’aurais été pour le petit gars à l’usine, s’il m’avait vu.

Je pourrais parier qu’en trois heures, je ferais plus de répétitions avec 80% de mon 1RM que ce mec balèze, s’il le faisait ne serait-ce qu’avec 40% de son 1RM. Faisons un petit calcul. Disons que son 1RM était de 270 kg. Alors, 40% est égal à 108 kg. Mon 1RM était de 180 kg, alors 80% est égal à 144 kg.

Alors, si moi, je faisais plus de répétitions en trois heures avec 144 kg que lui avec 108, qui serait capable de faire plus de travail utile ? Un simple exemple pratique de l’utilité de l’endurance de force.

Le travail de l’endurance de force

Alors, pour faire ce travail de l’endurance de force, je conseillerais d’utiliser 50 à 60% de votre 1RM dans un exercice qui engage tout votre corps. Faites 80 séries de 3 à 6 répétitions. Ou alors, choisissez un exercice qui engage plus le haut du corps et faites 40 séries, puis le bas du corps et faites encore 40 séries.

Sinon, vous pouvez pousser votre voiture sur 4-5 km, trainer ou porter une grosse pierre sur 1 ou 2 km. Porter un gros sac à dos sur 5 à 8 km. Utilisez votre imagination. Fixez-vous un objectif et allez-y. Quand vous l’atteindrez, vous vous sentirez comblé, accompli.

Endurance de force - entraînement

Par exemple, un jour, j’ai fait des ¼ Squats (depuis les supports) avec 360 kg. 100 séries de 20 répétitions. Lors de chaque répétition, la barre parcourait 7,5 cm. J’ai donc monté et descendu 360 kg sur 7,5 cm x 2000 = 150 m et soulevé un total de 720 tonnes sur 7,5 cm en trois heures. 720 tonnes, c’est l’équivalent d’une vingtaine de semi-remorques. Pas mal comme charge de travail pour une séance ?

Après cette séance, pendant cinq jours mon corps ressemblait à une pierre. Oui, après des séances pareilles, votre corps pourrait avoir besoin d’une semaine entière pour récupérer. Mais cela vous donne l’occasion d’aller en vacances ou vous occuper de vos affaires pendant quelques jours. Et croyez-moi, vous ne ressentirez aucune culpabilité de « rater » des entraînements. Vous saurez que ce repos, vous l’avez largement mérité.

En attendant, ces séances ont aussi le mérite de casser un peu la monotonie de l’entraînement.

Tout le monde aime les challenges

Si vous n’avez jamais fait ce genre de séances spéciales d’endurance de force auparavant, je vous lance un défi. Le défi de découvrir, pour vous-même, à quel point vous êtes réellement fort(e). Parce que, une fois que vous avez gagné le droit dans votre propre esprit de s’appeler « fort(e) », personne ne pourra vous le reprendre.

Choisissez le poids que vous croyez être capable de soulever 2000 fois en quelques heures, comme moi avec les ¼ Squats. Si vous faites des séries de 20, vous en aurez pour 100 séries. 200 séries de 10, 400 séries de 5… Cela vous donne l’idée de la fortitude dont je parle. Pour moi, c’était une des séances les plus dures de toute ma vie… Mais, bien sûr, je ne l’ai pas entreprise de but en blanc. J’avais déjà des années d’entraînement derrière moi.

Alors, 2000 répétitions n’est pas une obligation. Et prenez en compte le caractère du mouvement lui-même. Plus de distance le poids parcourt à chaque répétition, moins de séries et de répétitions vous devriez faire. Comparez le Soulevé de terre au Snatch, par exemple. Dans le premier, le poids monte peut-être de 50 cm, alors que dans le second, de 2 m, voire plus. Rappelez-vous, plus loin et plus vite le poids se déplace, plus vous faites de travail. Gardez cela à l’esprit.

Pour conclure

Le plus important : peu importe ce que je raconte au sujet des répétitions, des séries, des poids ou des pourcentages. Soyez votre propre maître. Servez-vous de votre sens commun. Puisque tout le monde est différent. Nous avons tous traversé des chemins différents pour arriver là où nous sommes aujourd’hui. Nos entraînements du passé et du présent ne se ressemblent pas. À chacun son histoire.

C’est pour cela que ce qui peut marcher pour moi aujourd’hui, ne marchera pas forcément pour vous. Ni pour moi-même à un autre moment de ma vie. Pour savoir où vous allez vous devez savoir d’où vous venez. C’est pareil pour la vie et pour l’entraînement.

Il est évident que vous lancer ce genre de défi dans les mouvements que vous ne maîtrisez pas ne vous mènera qu’aux urgences. Pour vraiment profiter de ce concept (que Pavel, dans « Simple & Sinistre v 2.0 », appelle « une secousse »), commencez par apprendre et perfectionner vos techniques. Nos formations officielles « StrongFirst Course » sont faites pour cela ! Pour vous inscrire à nos formations :

 

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