La tête haute : position de la tête lors des Swings et des Snatches avec Kettlebell

Il y  a quelques années, une idée étrange a vu le jour dans le monde clinique :  la tête d’insecte. Les blouses blanches ont déclaré que les athlètes doivent verrouiller la tête sur le torse lors des exercices de flexion des hanches. Il s’agit des Soulevés de terre, des Swings, ainsi que des Cleans et des Snatches.

Plutôt que vous laisser impressionner par l’apparence scientifique (ou pseudo-scientifique) de leurs arguments, posez-vous les deux questions suivantes.

Y a-t-il une épidémie de problèmes de cou causés par la technique traditionnelle (la tête relevée, le cou en extension) parmi les haltérophiles, les athlètes de force et les pratiquants hard style ?

La réponse est non.

Bien entendu, certains athlètes, quelle que soit leur discipline, ont des problèmes de cou. Mais de là à établir une relation avec la position de la tête dans les mouvements cités, il y a un monde. Certains pratiquants de la force athlétique ont aussi ce genre de problème, mais cela vient surtout de leur manière d’enfoncer la nuque dans le banc lors des Développés couché. Certains haltérophiles se blessent au cou, mais là aussi, la vraie cause, ce sont des mouvements de la tête brusques et techniquement inappropriés.

La Tête Haute - Position du Swing par Pavel

Brett Jones, Directeur de l’éducation chez StrongFirst, souligne que certaines personnes pourraient avoir des problèmes de cou si leur amplitude d’extension du segment thoracique était réduite. Dans ce cas-là, le cou est obligé de compenser pour garder la tête relevée et les yeux sur l’horizon. Il se met donc en hyperextension. Alors, quelle est la réponse ? Corriger le manque de mobilité thoracique avec des exercices spécifiques et sous contrôle professionnel. Et si le problème est d’ordre médical, alors il faut envisager une aide appropriée, voire une intervention.

A ne pas faire

En tout cas, la réponse ne consiste pas en un aménagement de la technique classique pour accommoder le dysfonctionnement. Ce serait comme si notre gouvernement baissait les standards du niveau physique pour les militaires ou les pompiers parce que de moins en moins de recrues sont capables de passer les tests.

En effet, il peut y avoir une condition médicale particulière où le médecin dira au patient que pour lui/elle garder la tête et le cou dans une position neutre dans les exercices de flexion des hanches est absolument nécessaire. Si votre médecin vous le dit, écoutez-le. Mais si c’est une prescription pour un autre patient ? Ne pensez-vous pas que prendre les médicaments de quelqu’un d’autre est dangereux ? La prescription médicale pour un patient particulier ne devrait jamais être considérée comme la procédure opérationnelle standard pour tout le monde.

Et maintenant, la deuxième question : est-ce que cette nouvelle technique, cette nouvelle position de la tête a amélioré les performances des athlètes de haut niveau ?

La réponse est : oui, pour certains. Mais la technique est loin d’être nouvelle.

Aspect lent : la force athlétique

Hugh Cassidy et Franco Columbu l’ont utilisée il y a déjà quarante ans. Si on passait en revue les positions de la tête des athlètes lors des championnats de force athlétique, on constaterait une variété remarquable. Andy Bolton a franchi la barrière mythique de 1000 livres [453,5 kg] avec le cou neutre. En fait, au démarrage il fixe un point au sol 2-3 m devant lui. Quant à Lamar Gant, le premier homme à soulever le poids égal à cinq fois son poids de corps (661 livres [299,76 kg] à 132 livres [59,86 kg]), il l’a fait avec son cou en hyperextension extrême.

Mettre son corps dans une position ou une autre est souvent donnant-donnant. Relever la tête et mettre le cou en extension aide à activer la chaîne musculaire postérieure, mais affaiblit quelque peu les abdos et les quadriceps. Un athlète consciencieux, avec l’aide de son coach et en écoutant attentivement son corps, devrait déterminer le donnant-donnant optimal pour lui. Pourtant, ce conseil n’est valable que pour les compétiteurs en force athlétique. Les amateurs et les athlètes d’autres disciplines devraient suivre les recommandations pour les exercices avec Kettlebells et avec la barre olympique détaillées ci-dessous.

La Tête Haute - Lamar Gant et Andy Bolton
Les Rois du Soulevé de terre : Lamar Gant (à gauche) et Andy Bolton (à droite)

Aspect rapide : l’haltérophilie et le Kettlebell hard style

A la différence du Soulevé de terre, un mouvement lent, les mouvements rapides (avec barre ou avec Kettlebells) ne tolèrent pas cette variabilité dans les positions de la tête. Il n’y a qu’une façon : la tête haute !

Quand un champion d’haltérophilie épaule 500 livres [~223 kg], vous imaginez bien qu’il est capable de faire un Soulevé avec une centaine de kilos de plus. Ce qui veut dire que ses abdos et ses quadriceps ne sont pas pleinement sollicités par le premier tirage (la partie Soulevé de l’Épaulé). Donc, voler Pierre (la chaîne postérieure) pour payer Paul (les quadriceps et les abdos) serait du gâchis puisque c’est Pierre qui fait la majeure partie du travail dans les mouvements rapides.

La position du cou lors des mouvements rapides est l’extension. La légende de l’haltérophilie Soviétique, l’Arménien Yurik Vardanian, vous montre la bonne façon de faire. Son record en total (Arraché + Épaulé-Jeté) datant de 1980 reste intouchable encore aujourd’hui.

Cela s’applique tout autant au pratiquant hard style.  Il n’a pas de problème d’arracher le Kettlebell au sol et sa colonne vertébrale n’est pas écrasée sous une charge énorme. Sa mission est d’accélérer la charge relativement légère (le Kettlebell) jusqu’à 10G. C’est le travail pour sa chaîne postérieure, donc il doit l’activer au maximum. Et c’est exactement l’effet produit par l’extension du cou. Relevez la tête (sans mettre le cou en hyperextension) dans la position basse et alors, votre face postérieure toute entière se mettra sous tension, vibrant avec l’énergie élastique accumulée.

Revenons aux classiques

Voici un extrait de Supertraining, un texte fondamental sur le renforcement/développement de la force :

La position de la tête a un effet très puissant sur la posture globale… Il est bien connu qu’en gymnastique l’inclinaison de la tête en avant amorce le salto avant. A son tour, l’inclinaison vers l’arrière amorce le flip arrière en gymnastique ou en plongeon… Il est vital d’utiliser une nette extension du cou pour faciliter une contraction puissante des muscles posturaux lors de tous les mouvements de soulever du sol. Cette action facilitatrice de la tête ne devrait pas être poussée au point de causer un creusement trop prononcé du dos… [Son objectif est de] maintenir le dos aussi près que possible de la position neutre avec ses trois courbures naturelle.

Le positionnement correct de la tête assurera la position du dos où la stabilisation du tronc est partagée entre les muscles extenseurs et les ligaments de la colonne vertébrale… L’action des yeux est étroitement liée à l’action de la tête. Il est donc essentiel d’utiliser les yeux pour guider la tête dans la position la plus appropriée pour chaque étape d’un mouvement donné pour faciliter la posture correcte. De manière générale, la position neutre de la colonne vertébrale est maintenue le plus facilement quand le regard est dirigé directement vers l’avant et fixé sur un objet distant.

Nous acceptons ces recommandations en tant que standard technique de notre curriculum.

(Incorrect – Correct)

Exceptions

La seule personne que j’aie jamais vue exécuter un parfait Swing hard style, puissant et gracieux, tout en gardant son cou quasiment neutre est Brett Jones. Il ajoute quelques nuances à la recommandation standard et offre quelques options :

Si votre tête subit un coup sec vers l’arrière quand vous rattrapez le Kettlebell dans la descente, alors c’est une mauvaise chose. Si vos bras sont connectés au corps et si vous choisissez de maintenir l’extension, cela peut être une bonne chose. Quand j’essaie de fixer mon regard sur le mur en face, j’ai la sensation d’être brusquement tiré dans une extension au niveau des cervicales, ce qui n’est pas agréable. Pour moi, il est bien mieux d’avoir un point [pour fixer le regard] beaucoup plus près (1,50 à 2 m devant).

Brett ajoute que son cou est en réalité dans une légère extension, même s’il regarde le sol à 2 m devant lui. Il note également que la plupart de ceux qui pensent que leur cou est neutre, sont en réalité en flexion.

Brett nous met en garde par rapport à l’hyperextension. Il est facile de tomber dans ce piège quand on fait ses Swings avec les jambes presque tendues. Si vos genoux sont à peine pliés dans la position basse, votre torse est forcément parallèle au sol (ou presque). Dans ces conditions-là, regarder droit devant va automatiquement mettre votre cou en hyperextension. Rappelez-vous que le Swing hard style est un mouvement de la même famille que le saut. De ce fait, il demande une certaine flexion de genoux. Pas au point de se transformer en Squat, mais suffisamment pour activer les muscles fessiers.

Points de repère

  1. La recommandation standard pour les Swings, c’est de fixer les yeux sur l’horizon. Cela relèvera votre tête et mettra votre cou en légère extension dans la position basse. Cela, à condition d’avoir une extension thoracique saine et de ne pas garder les jambes tendues. Cet horizon peut être, par exemple, la jonction entre le sol et le mur (si vous êtes suffisamment éloigné). Notez que l’horizon est plus bas que le niveau de vos yeux.
  2. Vous n’arrivez pas à regarder droit devant dans la position basse du Swing sans mettre le cou en hyperextension ? Il se peut que le haut de votre dos soit trop raide. Dans ce cas-là, trouvez un professionnel pour corriger ce problème avant d’aborder un programme basé sur des Swings.
  3. Disons que vous possédez la mobilité nécessaire et pliez les genoux, mais que votre cou n’est toujours pas à l’aise dans la position basse du Swing. Alors, assurez-vous que ce sont les dorsaux qui absorbent les forces lors du mouvement du Kettlebell vers l’arrière. Ce n’est pas le travail des trapèzes, ni du cou. Si votre cou n’est toujours pas à l’aise, expérimentez en baissant légèrement la tête. Fixez votre regard sur un point un petit peu plus bas (typiquement, au sol, 1,5 à 3 m devant vous).
  4. Ne projetez jamais votre tête en arrière (cou cassé) dans la position basse ou en avant (chicken head) dans la position haute du Swing.

En conclusion

Votre préparation physique doit s’adapter à vos objectifs et à votre mode de vie, puisque son but est de vous préparer pour être une meilleure version de vous-même. Vous devriez choisir votre programme et vos exercices de façon à ce qu’ils renforcent votre capital de santé et de force, plutôt que de le drainer à sec. Mais quel que soit votre choix de programme de préparation, il faut commencer par en maîtriser les outils. C’est l’objectif de nos formations techniques officielles :

En revanche, si vous vous entraînez depuis longtemps et souhaitez désormais partager votre expérience avec d’autres passionnés, alors nous pouvons vous enseignez la meilleure manière de le faire lors de nos certifications d’instructeurs :


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