Suspension : pourquoi tout le monde devrait en faire

 

La suspension est une des fonctions physiques fondamentales de l’être humain. Nous savons aujourd’hui que nous ne descendons pas des singes. Plutôt, nous avons avec eux un ancêtre commun. Mais nous pouvons tout de même dire avec certitude qu’hier encore (par rapport à l’histoire globale de notre espèce) notre survie pouvait dépendre de notre capacité de rester suspendu à une branche ou un rocher. Et cela peut encore être le cas aujourd’hui ! Dans l’article ci-dessous, Pavel Macek, StrongFirst Master Instructor, nous donne quelques clés pour recouvrer cette fonction physique capitale.


Voudriez-vous que je vous parle d’un exercice qui pourrait améliorer votre mobilité, votre force et votre posture ? Un exercice qui pourrait vous aider à vous débarrasser de certaines douleurs, accélérer votre récupération et devenir votre antidote à la gravité ?

Il a un effet bénéfique sur les mains, les coudes, les épaules, le dos et les abdos, mais ne nécessite que très peu de matériel. Pourtant, malgré tous ces atouts, il reste largement sous-utilisé par la majorité des pratiquants.

Cet exercice est la suspension.

Vous vous souvenez de l’époque où, enfants, on grimpait sur les monkey bars ou les arbres ou les clôtures ? On se suspendait, à l’endroit et l’envers, et on balançait sur un bras, puis sur l’autre (la brachiation). On sautait sur les branches, on montait et basculait par-dessus, on inventait des numéros par impressionner nos amis… Toutes ces formes de suspension étaient une sorte d’amusement actif. Elles ne portaient pas la notion d’exercice organisé, mais livraient quand même des bénéfices. Des bénéfices précieux dont on ne pensait ni ne se souciait pas.

Suspension : curriculum Resilient

Les bénéfices de la suspension

Il serait difficile de rendre justice à tous les bénéfices de la suspension dans un seul article. Pour n’en citer que les principaux, elle permet de :

  • Décompresser la colonne vertébrale.
  • Étirer les grands dorsaux.
  • Ouvrir les épaules.
  • Renforcer les muscles de la coiffe des rotateurs et les stabilisateurs de la scapula (omoplate).
  • Développer la force et l’endurance des mains et des avant-bras.
  • Renforcer les muscles de la ceinture abdominale.

La suspension est une des clés pour la santé des épaules. Le docteur John M. Kirsch écrit dans son livre Shoulder Pain ? The Solution and Prevention (2014) :

« Si vous voulez être capable d’utiliser vos bras pour des manipulations au-dessus de la tête, vous devez le faire régulièrement ! Vous devez consacrer du temps à l’activité à laquelle les épaules sont spécialement adaptées : la brachiation ! Ou, tout du moins, simuler celle-ci avec la suspension et le travail avec des charges modérées. »

L’étude menée par l’Institut Kirsch, présentée en 2012, portait sur 93 participants. La majorité d’entre eux :

« … souffraient des douleurs aux épaules depuis de nombreuses années. … ont essayé d’autres méthodes de traitement, parfois onéreux, mais toujours sans résultat. La plupart de ces participants étaient sur la liste d’attente pour une intervention chirurgicale. De ces 92 participants, 90 ont retrouvé un niveau confortable d’activité quotidienne. »

Le message du docteur Kirsch est simple : « La suspension sur une barre et le travail avec des charges modérées règlent la majorité des problèmes des épaules. »

Suspension et StrongFirst Resilient

Les bénéfices sont si nombreux qu’on se demande pourquoi le fitness mainstream a mis la suspension aux oubliettes. Heureusement, ce n’est pas le cas de StrongFirst Resilient! Son curriculum de suspension prend pour base l’expertise des hommes forts du passé, mais aussi des experts modernes.

Pavel Macek, StrongFirst Master Instructor

Pavel souligne l’importance de la décompression de la colonne vertébrale dans ses livres Relax into Stretch et Super Joints. Il y explique pourquoi elle était si populaire dans la culture de la force aussi bien en Orient qu’en Occident et pourquoi elle devrait l’être de nouveau aujourd’hui.

Écoutez Bob Hoffman de York Barbell :

« Depuis plusieurs années, les champions de l’équipe York font certains exercices pour garder leur dos dans une bonne condition. La suspension en est un. Elle a tendance à arrêter la congestion en libérant les différentes parties du corps de toute sorte de pression. L’âge se manifeste quand le corps commence à se recroqueviller. Alors, plus longtemps nous serons capables de repousser cela en :

  • Nous tenant bien droit, assis ou debout
  • Faisant de l’exercice pour garder les muscles élastiques et bien vivants
  • Pratiquant la suspension au moins modérément

Plus longtemps nous pourrons nous sentir, agir et paraître jeunes. »

Bob Hoffman, The Lower Back, Part II, Strength and Health, 1957

Suspension : l’introduction

La suspension passive et active

Commencez avec une prise en pronation, les mains à la largeur des épaules. Mettez vos pouces autour de la barre.

Relaxez-vous. Laissez vos bras se tendre et les épaules monter. Relâchez votre cage thoracique, la colonne vertébrale et les jambes. Faites partir toute la tension en laissant la gravité faire son travail.

Exécutez la même séquence, mais cette fois-ci, avec une prise en supination. Finalement, si vous disposez des barres parallèles ou des anneaux, répétez avec une prise neutre.

Attention, commencez avec une suspension assistée (les pieds sur un support quelconque) si :

  • La force de vos mains n’est pas suffisante par rapport à votre poids de corps.
  • Vous avez subi un traumatisme au niveau du coude ou de l’épaule.

Dans ce genre de cas, nous conseillons également de commencer par une suspension active. La règle générale, c’est :

« Si les épaules sont stables, utilisez la suspension active. Sinon, passive. »

Ido Portal

Décompression active de la colonne vertébrale

Augmentez l’effet de décompression de la colonne vertébrale :

« En suspension, cherchez à atteindre le sol avec vos talons. Notez que l’effet en est totalement différent que lorsqu’on pointe les orteils. Pousser avec les talons est le meilleur moyen d’avoir un bon étirement de la colonne. »

Tommy Cono

« … la décompression de la colonne par une suspension sur une barre de traction… permettra aux discs [intervertébraux] de se réhydrater. Vous allez retrouver la taille que vous aviez dans votre jeunesse. Mais aussi, contribuerez énormément à la santé et à la mobilité de votre colonne vertébrale. »

Pavel, Relax into Stretch

Ajoutez la respiration contrastée

« Inspirez à fond, puis contractez tous vos muscles. Gardez l’air et la tension une ou deux secondes, puis relâchez soudainement avec un soupir… Lors de l’inspiration, assurez-vous que vous ne remontez pas : cela réduira l’étirement. »

Pavel, Relax Into Stretch

Ajoutez les mouvements des jambes et du corps

Pour augmentez l’amplitude, bougez les jambes et le torse :

  • De gauche à droite dans le plan frontal
  • En rotation
  • D’avant en arrière (sortez et rentrez la poitrine)

Gardez les bars bien tendus. Évitez d’aller vite.

« En suspension libre, Tartakovsky conseille de faire toute sorte de mouvements pour amplifier l’effet. Balancer et tourner les jambes, ensemble et séparément. Faire des rotations non balistiques du torse en gardant les pieds joints. »

Pavel, Super Joints

Descendez avec précaution

À chaque fois que vous faites de la suspension, avant de descendre, contractez vos abdos et gardez la tension quelques secondes. Ensuite seulement, relâchez la prise pour sauter. Mieux encore, écoutez Tommy Cono :

« Après une suspension, évitez de sauter. Plutôt, préparez en amont une chaise ou une box pour monter dessus. Le saut produira une compression, alors, si possible, évitez de la faire. Une descente en douceur est préférable. »

Équipement

Ido Portal est un grand promoteur moderne des exercices de suspension et de brachiation. Son programme Hanging Month contient beaucoup d’idées et de techniques très utiles. Écoutez son conseil :

« Les anneaux sont meilleurs pour l’alignement, mais ils ne sont pas stables. Ils conviennent mieux aux épaules fortes, mais qui manquent de mobilité. Ils sont également le meilleur choix pour celles et ceux qui ont des soucis avec leurs poignets ou leurs épaules. Pour une barre de traction, c’est l’inverse. Sa stabilité en fait un meilleur choix pour les épaules plus mobiles, mais moins fortes. Si vous avez la mobilité et la force optimales, variez les supports que vous utilisez aussi souvent que possible. Une barre de traction classique ou inclinée, les barres parallèles et les anneaux. Mais aussi les cordes, les serviettes, les corniches, les prises d’escalade, etc. »

Suspension : un programme

Roger Nelsen a résumé les points les plus importants sur le forum de Dave Draper :

  • Faites un quelconque exercice qui comporte la suspension à chaque séance.
  • Exécutez tous les tirages à partir d’une suspension immobile.
  • Variez vos exercices de suspension, mais essayez de progresser dans chacun.
  • Ne vous limitez aux tirages par flexion des bras, mais consacrez du temps à travailler les tirages bras tendus. Par exemple : le Front Lever, le Skin the Cat, le Relevé des jambes, etc.

Suspension inversée

« Globalement, la plupart des gens ne passent pas assez de temps en suspension. S’ils le faisaient, ils seraient beaucoup plus forts et résilients. »

Roger Nelsen

Nous en ajouterions :

  • Visez les « séries » de +30 secondes.
  • Distribuez votre travail de suspension sur toute la journée. GTG marche le mieux. Installez une barre de traction ou des anneaux chez vous ou sur votre lieu de travail.
  • Devenez StrongFirst Resilient !

« Associez un travail de suspension à votre travail avec des poids. Une série de suspension après une série de Soulevé de terre est un bon ajout au programme de force de Power to the People ! »

Pavel, Super Joints

Curriculum de suspension StrongFirst Resilient

Jusqu’ici, vous n’avez vu que quelques simples exercices d’introduction. Notre curriculum complet de suspension répond à celui de support bras tendu (celui du Relevé et de ses variantes). Il se focalise sur les différentes modalités de suspension avec une progression allant du passive vers l’active, puis dynamique ; sur deux, puis sur un bras. Il aborde également ce travail sous l’angle de flexion et d’extension de l’épaule.

  • Suspension passive
  • Respiration contrastée
  • Mouvement des jambes et du torse
  • Suspension active
  • Position creuse suspendue (partielle) active
  • Suspension active arquée
  • Balancement latéral avec un relâchement (partiel) de la prise
  • Balancement avant-arrière
  • Suspension passive et active sur un bras
  • Accroupissement inversé
  • Suspension « allemande »
  • Skin the Cat
  • Etc.

Progression de la suspension

Comment progresser en suspensions

Lorsque vous avez réhabitué votre corps à la suspension, vous pouvez, pour progresser, choisir entre plusieurs modalités. Les différentes formes de tractions, le Relevé des jambes et le Front Lever, tous couverts dans notre curriculum d’instructeur SFB. Mais aussi Back Lever, la brachiation, le Muscle-up, l’escalade, voire grimper sur les arbres.

Écoutez Gray Cook, le créateur de Functional Movement Systems :

« Enfant, vous balanciez sur les monkey bars depuis des mois, lorsque vous avez décidé, pour la première fois, de tirer pour vous rapprocher de la barre, puis passer au-dessus. Mais pourquoi nous ne le faisons plus ? Si la portée de charge a un sens, alors pourquoi pas la suspension ? Pourquoi pas la brachiation ? Elles devraient.

Peut-être que ce qui limite vos tractions, ce n’est pas la force de vos dorsaux, mais votre capacité de suspension. Je ne dis pas que votre grip est faible. Mais peut-être que vous n’êtes pas capable de rester suspendu, tout simplement. »

Pour progresser en tractions, Gray Cook recommande de tripler le temps que vous passez en suspension bras tendus et fléchis.

Oubliez l’exercice et pour un moment, laissez l’enfant en vous jouer, tout en sachant que vous avez la résilience pour en profiter.

Retrouvez un enfant en vous !

Laissons le mot de la fin à l’Athlète du siècle de la Fédération Internationale d’haltérophilie, Tommy Cono :

« … la suspension est à l’opposé de ce que vous faites lorsque vous mettez des poids au-dessus de la tête. Vous chargez et comprimez toutes ces articulations… Quelques minutes passées à faire ces exercices [de suspension] ont une énorme rentabilité en termes de récupération et de bien-être plus tard. »

Tommy Cono, Weightlifting, Olympic Style, Honolulu, 2009

Pour conclure

Vous pouvez retrouver Pavel Macek, Master StrongFirst, lors de la formation StrongFirst Resilient, le 9-10 Février 2020 à Paris. Mais aussi lors de la certification d’instructeurs de préparation physique avec le poids de corps SFB, le 11-12 Juillet 2020, toujours à Paris.

En attendant, n’oubliez notre formation officielle StrongFirst Bodyweight Course, le 12 Octobre et le 29 Décembre 2019, à Paris.

Formation StrongFirst Resilient

Images: Justyna K. Macková, StrongFirst Certified Team Leader, StrongFirst EliteDLAB Photography and Visual Arts

 

 

 

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